Ah, la bibliothèque. Endroit dédié aux plus érudits, endroit fait de bois de poussière et d’ouvrages sans images au cas où certains crétins pensaient que l’université rimait avec amusement toute l’année. Bien évidemment, Elliott Baldwin ne faisait pas partie des étudiants provenant de la populace, autrement dit les incultes. Au contraire. Fils de diplomate, son père adoré s’était assuré avec soin de mettre un livre de Nietzche entre les mains de sa progéniture pour qu’il délaissât les bandes dessinées ou toute autre crétinerie dans ce genre. A quinze ans, le jeune homme en savait déjà beaucoup plus que ses camarades de classe. Il récoltait de bonnes notes plutôt facilement, faisait la fierté de ses professeurs. L’université représentait un tout autre enjeu. Presque devenu adulte, Elliott devait admettre se reposer sur ses acquis, pensant avec effroi qu’on lui avait déjà attribué une place dans le cabinet d’avocats prestigieux des associés de son père à New York. Alors à quoi bon de se tuer à la tâche quand on finirait ses jours à défendre des tas de personnes, d’entreprises au barreau de New York ? Telle était la question à laquelle le jeune homme avait trouvé une réponse : profiter de sa dernière année, bosser bien évidemment et ça s’arrêtait là. Assis à une table située tout au fond de la bibliothèque, le jeune homme se surprenait parfois à observer les élèves passer dehors, certains en riant de bon cœur, d’autres marchant d’un pas déterminé. Puis, d’un geste singulier, il se remettait à lire inlassablement l’œuvre de John Locke, crayon à papier en main. En fait, il ne travaillait pas vraiment mais attendait une charmante créature censée le rejoindre dans peu de temps. Et oui, encore une jeune femme. Encore un autre qui finira dans son lit sans grande difficulté. Noélie Young était une demoiselle qui avait capté l’attention d’Elliott plus d’une fois. Il était venu dans sa chambre pour parler un peu, lui avait offert une modeste fleur et allait travailler avec elle sur l’organisation d’un bal de charité destiné à récolter des fonds pour construire des écoles et des hôpitaux équipés dans les pays du Tiers-Monde. Et étrangement, quand il sut que miss Young comptait s’en occuper, le sieur Baldwin s’est immédiatement jeté sur le projet, lui qui voulait le refiler à l’un de ses frères. Ce fut donc d’humeur joyeuse qu’Elliott s’était rendu à la bibliothèque, s’installant le plus loin possible de l’entrée au cas où il voudrait s’amuser un peu avec sa compagne. Il l’attendait, livre à la main, se balançant sur sa chaise, un pied contre la table pour lui assurer un équilibre parfait. Equilibre qui fut rompu par la présence d’une personne, manquant d’assister à la chute d’Elliott. « D’un peu plus et mon statut de président de confrérie n’avait plus la moindre valeur à tes yeux », murmura-t-il doucement, dans un sourire. Il ferma son livre, le posa sur la table et observa la demoiselle prendre place à ses côtés. « Toujours aussi divine, Noélie. Je vais finir par croire que tout ça est pour moi. » Bon d’accord, il commençait peut être un peu trop fort mais au moins, cela avait le mérite d’être clair. Que voulez-vous, on ne change pas un Baldwin.

La veille ou encore l’avant-veille, Noélie s’était proposée pour s’occuper du bal de charité qu’organisaient les Oméga Phi et les Sigma Tau. Bien évidement, la demoiselle n’avait pas réfléchit pas à deux fois avant de se jeter sur l’occasion. Premièrement, c’était un moyen d’échapper à ses sœurs et de se changer les idées en même temps que d’être utile à sa sororité. Puis, dans un second temps, cela pouvait toujours être bénéfique pour redorer son image auprès de certaines de ses sœurs. Sans compter qu’au vu de l’enthousiasme qui avait embaumé la pièce lorsque Bethany avait expliqué l’idée…Cependant, ce n’était en rien un sacrifice. Soit. Et voilà, maintenant le rendez-vous était fixé: demain, bibliothèque. Avec le confrérie de la fraternité en plus. Cette note l’ayant même faite doutée un moment, se demandant si ce n’était pas mieux au final que ce soit la présidente de sa sororité qui s’en charge du coup. Mais non, cette dernière lui avait assuré qu’elle pouvait y aller. Bref. (…) Toute la nuit, la belle avait réfléchit à quelques idées, fouillant dans quelques bouquins qu’elle avait trouvé à sa disposition dans le pavillon pour éviter de faire un remake de ce qui avait été fait par le passé. Soit, et ce fut sur ces idées qu’elle s’endormit et se réveilla. (…) Après son cours d’histoire et analyse du cinéma contemporain, Noélie rangea pêle-mêle ses bouquins avant de courir vers le pavillon des OP, vider son sac, ramasser un cahier et chemise qui contenaient des notes qu’elle avait prise la veille, avant de quitter le pavillon au pas de course en direction de la bibliothèque. Une fois devant l’immense porte en chêne, Noélie se cala contre le mur, essoufflée, ferma les yeux un instant histoire de reprendre ses esprits, sa respiration dans le même temps et passa la porte. L’Oméga Phi adressa un sourire à la blonde peroxydée et occasionnellement bibliothécaire (mais aussi fiancée de l’inspecteur qui arpentait les couloirs de la MVU, de ce qu’elle avait entendu dire. Mais soit.), elle chercha Eliott des yeux un moment avant de le trouver dans un coin au fond de la pièce. Noélie se pinça les lèvres, haussa les épaules et aligna les pas en sa direction.
« D’un peu plus et mon statut de président de confrérie n’avait plus la moindre valeur à tes yeux » Noélie sourit à sa remarque. « Ne t’en fais pas j’aurais su tenir ma langue » fit-elle mutine avant de tirer une chaise et de s’installer. La blonde ouvrit son sac pour en sortir ladite chemise et la pochette qui contenait son ipad avant de se sentir observée et releva le visage vers le brun qui la complimenta. « Je.. Merci » répondit-elle quelque peu gênée avant de sourire en entendant la suite. « Une Oméga Phi se doit être divine à n’importe qu’elle heure du jour ou de la nuit et pour n’importe qui » plaisanta-t-elle en lui lançant un clin d’œil amusé. Noélie passa une main dans ses cheveux, alluma sa tablette, croisa une de ses longues jambes par-dessus l’autre avant de vriller ses prunelles ambres vers les siennes. « Donc, tu as des idées ? » commença-t-elle. Oui, là était quand même le propos de la chose, et tout le propos de ce ‘rendez-vous’.