Quoi de mieux que de profiter de l'air frais et quand personne n'était là pour vous insulter à longueur de journée ? C'est ce que Jaden était précisément en train de se demander. Allongé dans l'herbe une cigarette qu'il avait réussi tant bien que mal à allumer malgré sa main fracturée, il se complaisait dans son actuelle solitude. Les fêtes lui manquaient certes mais les membres de sa fraternité étaient loin d'être un manque pour lui. Alors au final, les bagarres récurrentes et sa soudaine baisse de popularité n'étaient peut être pas une mauvaise chose pour lui qui aimait tant se servir de ses poings, en témoignait sa main endolorie. Et s'il avait perdu toute crédibilité aux yeux de tout le monde, il avait pu constater qui étaient ses réels amis et qui ne restait avec lui que pour bien se faire voir. Et force était de constater qu'au final les gens à l'université accordaient bien plus d'importance au regard des autres qu'à l'amitié. Mais au fond il l'avait toujours su. Et il n'avait pas envie de se prendre la tête avec ça, surtout quand il pouvait profiter de la tranquillité du lac sans que personne ne vienne le déranger ce qui se faisait de plus en plus rare. Autant avoir des pensées positives. Perdu ses pensées, il sursauta alors quand il entendit des bruits de pas derrière lui. Lui qui pensait avoir la paix c'était raté, se retournant alors il constata que la personne qui venait de troubler sa quiétude était Noélie. Et il fut tout de suite bien moins réticent à l'idée de s'arracher à ses pensées. Au contraire de la moitié de l'université, elle ne le jugeait pas et il était ravi de voir que leur amitié avait survécu à toute cette histoire parce qu'elle était réellement quelqu'un qu'il appréciait. « Heureusement que c'est toi, j'avais peur de devoir encore une fois me servir de mes poings. », lui lança-t-il alors un sourire sur les lèvres. Il était incapable de débuter une conversation autrement que par du sarcasme, loin de lui les politesses comme bonjour ou ces autres futilités.

Je descends les quelques marches du perron du pavillon des Oméga Phi. Oméga Phi dont je fais partie intégrante maintenant. Enfin, j’espère ne plus avoir de mauvaises surprises. Soit. J’ai décidé de courir aujourd’hui. Oui, la forme ça s’entretient à ce que l’ont dit. D’autant plus lorsqu’on fait partie des cheerleaders de l‘université. Mine de rien et contrairement à tout ce que l’on peut en dire, c’est un sport, un vrai. Le genre qui te fais suer, le genre qui te pousse à avoir une préparation physique béton si tu veux tenir. Bref; C’est donc vêtue d’un court short rose et d’un polo blanc surmonté de la mention « Oméga Phi » en lettres roses que je me suis sapée ce matin. Et, dieu seul sait, que j’adore être vêtue de la sorte. Autrement dit, au couleur de ma sororité. Le soleil brille, le ciel est dégagé, et ce n’est pas limite si les oiseaux chantent. On se croirait au printemps. La première idée qui me vient est celle d’une superbe journée en perspective, alors je souris. Oui, je souris tout simplement. Je souris parce que la vie est faite de toutes petites choses. J’hausse les épaules, place mes écouteurs et appuie simplement sur la touche « play » de mon Ipod. Après quoi, je m’élance. Je m’élance sans trop réfléchir, je m’élance dans le campus quasi-désert de la MVU à petite foulées. Petites foulées qui, rapidement, s’espacent et deviennent de plus en plus grandes. Je sens mon sang circuler dans mes veines à une vitesse fulgurante. Je cours. J’entends les battements de mon cœur s’accélérer. Je cours. Le vent fouette mon visage poupin, il fait virevolter mes cheveux attachés en queue-de-cheval. Je cours, bordel. Quel bonheur. Je passe mes jambes l’une devant l’autre, de plus en plus rapidement, de plus en plus vite. La musique me donne des ailes. Je cours sur son rythme. Le campus est immense, je veux en faire tout le tour. Ma respiration devient irrégulière, saccadée, et pourtant je continue. Je continue jusqu’à ne plus en sentir mes jambes. Ma vision s’altère, mon champ de vision se rétrécit, mais je ne m’arrête pas. Non, bien au contraire. Mon envie d’accélérer est plus que jamais là. J’augmente le volume du son dans mes oreilles à m’en péter les tympans. Mais je m’en fous car je cours. (…) Evidement, toute bonne chose à une fin. Et la mienne, trouve un terme lorsque je me suis prise les pieds dans des lacets mal noués. Néanmoins, je réussis à amortir la chute, épargner mes genoux, en me bousillant les mains. Et, je ris. Je ris parce que c’est stupide. Je ris parce que je me suis surpassée et que j’aime ca. Je ris parce que mes mains me font mal. Puis, je me relève. Mes jambes tremblent. Je souris. J’aligne un pas devant l’autre, l’idée d’aller plonger mes mains meurtries dans l’eau froide du lac trottant dans mon esprit. C’est alors qu’en chemin je croise Jaden. Ce beau brun et ami. Je m’arrête et lui décoche un large sourire « Heureusement que c'est toi, j'avais peur de devoir encore une fois me servir de mes poings » dit-il un sourire aux lèvres. « De toute façon, vu l’état de celle-ci, je n’ai aucun doute sur la gagnante du combat » je rétorque, mutine, un brin espiègle, en désignant d’un signe de tête sa main fracturée. Sans parler de l'état de mes mains.

Avant de savoir qui s'était ainsi approché de lui, il s'était déjà préparé à devoir user une énième fois de ses poings pour se défendre. Quelle aubaine à vrai dire, Jaden tout seul sans aucun témoin aux alentours, quel KBO n'en aurait pas profité pour engager la bagarre avec lui sachant qu'il lui en fallait peu pour se mettre à colère. Alors il était heureux de voir que personne n'était là pour le provoquer, et que c'était Noélie qui venait en paix. C'était toujours plus agréable d'être confronté à un ami qu'un ennemi. Et étant donné que Jaden avait plus d'ennemis, il était légitime qu'il ait pensé qu'on venait encore l'insulter de tous les noms, sans réellement savoir pourquoi cela dit. Parce qu'au fond toute cette histoire n'avait aucun sens, mais il avait arrêté de se prendre la tête avec tout ça, arrêté parce que cela n'en valait pas la peine. Et que de toute manière il avait toujours des amis qui le soutenaient et qu'au final c'était bien le plus important. Et il était heureux de voir que Noélie s'était rangée dans cette catégorie là, et qu'elle ne l'avait pas fuit comme la peste, parce qu'elle était réellement quelqu'un qu'il appréciait. « Comme si j'allais me battre avec toi ! » Jamais au grand jamais il ne lèverait la main sur une fille, ou n'oserait se battre avec une femme. Alors il ne put s'empêcher de rire à la remarque de son amie, parce que s'il avait la réputation d'être quelqu'un d'assez violent cela ne s'appliquait qu'aux personnes de sexe masculin. Jaden porta alors son regard plus longuement son regard sur la jeune femme en face de lui et ne put que constater qu'elle venait apparemment de courir. Ses yeux s'attardèrent alors plus longtemps sur les mains de Noélie, qu'il prit dans sa main droite, incapable de faire le moindre mouvement avec son autre main fracturée. « Qu'est-ce qu'il t'es arrivé ? », demanda-t-il alors véritablement soucieux de savoir ce qui s'était passé pour que ses mains soient autant écorchées. Elles n'étaient pas dans le meilleur état possible, et même si cela serait sûrement parti dans quelques jours il voulait savoir comment elle avait bien pu se faire ça. En réalité il voulait surtout savoir, si elle quelqu'un était à l'origine de sa blessure ou si sa maladresse avait entraîné ces blessures.

Je lui souris à nouveau puis m’approche. « Comme si j'allais me battre avec toi ! » rétorque-t-il, alors je ris. Je ris aux éclats même avant de braquer mes prunelles noisettes vers les siennes. « Comme si tu le pouvais ! » je répond d’un air provocateur, sourcil arqué, semi-sérieuse avant de ne pouvoir plus longtemps me retenir de rire. « Je plaisante » j’ajoute à son adresse. Non que me prendre un poing en pleine face ne me tente que très peu voire pas du tout mais presque. Soit. Néanmoins, le fait de le voir sur le qui-vive et autant sur la défensive me fit comprendre qu’il n’avait pas fini de se battre avec autrui. Je lâche un soupir exaspéré, espérant qu’il comprenne ? De toute façon je ne me gêne pas pour lui faire la remarque. « Tu n’en as donc pas fini avec tout ca » Un ton de reproche. Je reste néanmoins évasive, certaine que, maintenant, il sait où je veux en venir. Après quoi, je m’avance d’encore un pas en sa direction, m’appuie sur mes genoux écorchés, réprime une grimace et mord l’intérieure de ma joue. Puis, je prend son visage entre mes mains, et sans hésitation ou gêne je scrute son visage en quête de plaies cachées. « Je le savais ! » fis-je en appuyant -sans ménagement- sur l’hématome, presque guérit juste sous son œil, de mon index. Cependant, pendant mon investigation ce dernier eu le temps d’apercevoir les fruits de ma maladresse: mes mains. « Qu'est-ce qu'il t'es arrivé ? » demande-t-il en prenant l‘une de mes mains. Je perçois dans sa voix une réelle ‘inquiétude’. Et je lui souris pour le rassurer. « Rien, rien ! Tu vas rire si j’te le dis. Enfin non, tu vas te foutre de ma gueule ! » dis-je avant que mon rire cristallin ne résonne, et qu'un large sourire rayonnant, mutin, n'étire mes fines lèvres. « Puis, ne change pas de sujet ! -pause- ou alors... tu me dis comment et qui t‘as fais ca et je te raconte pour mes mains » Je propose, car oui les compromis c’est-ce qui marche le mieux de nos jours. « Deal ? » j’ajoute, plantant mes prunelles dans les siennes, tentant d’être le plus convaincante ou persuasive -comme vous voulez- possible.

Il était évident que même si cela ne révélait que de la plaisanterie, elle n'avait pas tort. Jaden était totalement incapable de se battre en ce moment, au risque de perdre sa main (non il n'exagérait jamais), il aurait du mal à se servir de son poing gauche. Il lui restait évidemment l'autre main, mais il était beaucoup moins habile avec celle-ci. Alors quelque part il valait mieux pour lui que ce soit Noélie qui l'ait trouvé et non pas quelqu'un d'autre. Il aurait tout de même été capable d'asséner un coup, mais certainement qu'il en aurait pris bien plus qu'il n'en aurait donné. Comportement que réprimandait évidemment la jeune femme, qui ne cessait de lui dire d'arrêter ses mauvaises manières. Chose qu'il était incapable de faire, c'était comme lui demander d'arrêter de fumer. Il en était incapable. Ce n'était pas quelque chose qu'il arrivait à gérer lui-même. C'est véritablement quelque chose qui prenait le dessus sur lui, et dont il avait fini par s'accommoder. « Tu sais bien que ce n'est pas aussi simple que cela. » Et même si de temps en temps, il aimait provoquer des bagarres par simple plaisir, il se serait bien passé de cet affrontement quotidien qui l'obligeait tout le temps à avoir les mains en sangs ou fracturées comme à cet instant. Puis avant qu'il ne puisse se rendre compte de quoi que ce soit, Noélie prit son visage entre ses mains pour observer quelque chose qui semblait se trouver sous son œil. Un vestige de la même bagarre qui lui avait coûté les os de sa main. Un bleu qui avait fini par s'estomper et qu'on ne voyait pas vraiment si l'on ne s'approchait pas. Il n'avait plus envie d'en parler, c'était de l'histoire ancienne. Pourtant il semblait bien qu'il allait devoir s'expliquer sur ce qui lui avait valu cette main fracturée, puisque Noélie lui proposait un marché qu'il ne pouvait refuser. Même si l'histoire de la jeune femme semblait être amusante et qu'il n'avait plus à s'en faire et qu'il n'aurait pas le visage de quelqu'un d'autre à abîmer, il voulait tout de même l'écouter. « Ok ça marche », répondit-il en soupirant, avant qu'un léger sourire ne vienne s'installer sur son visage. Sourire qui ne restait jamais bien longtemps, lui reprenait tout de suite son visage sans expression la seconde après. « Je me suis encore battu comme tu peux t'en douter. Un autre abruti qui l'avait bien cherché. Comme d'habitude, pourtant ils savent bien qu'il ne faut pas m'énerver. Le résultat a été une bagarre comme tu peux t'en douter, et disons que j'ai peut être tapé un peu trop fort. » Et à en juger l'état de sa main, il disait vrai, n'étant sur le même pas capable de contrôler sa colère et sa force. « A ton tour maintenant. »

Jaden finit par dire, comme bien souvent, que ce n’était pas aussi simple que cela. Et, je souris, un petite sourire, celui entre l’exaspération et l’exaspération. Je ne comprendrais jamais ce besoin qu’il avait de vouloir se faire taper dessus. Et, le pire dans l’histoire, c’est que c’était devenu comme essentiel. Aussi essentiel qu’un drogué tient à sa dose. J’exagère à peine. Presque pathologique son histoire. Soit. Puis je roule des yeux, histoire d’insister sur le fait. Mes mains lâchent son visage et je me recule légèrement pour m’installer dans l’herbe attendant sa réponse. Réponse positive qui ne tarda pas à venir. Puis, je souris de nouveau, satisfaite. « Je me suis encore battu comme tu peux t'en douter. Un autre abruti qui l'avait bien cherché. Comme d'habitude, pourtant ils savent bien qu'il ne faut pas m'énerver. Le résultat a été une bagarre comme tu peux t'en douter, et disons que j'ai peut être tapé un peu trop fort. » Doux euphémisme. Je secoue la tête me retenant de le réprimander à nouveau. « J’espère qu’il le méritait réellement, parce que vu l’état de ta main ce serait… ridicule » je dis en affichant un large sourire moqueur pour lui soutirer encore plus d’informations, comme par exemple, ce qu’avait fait l’inconnu avec lequel il s’était battu pour écoper d’un tel traitement. Parce qu’à l’en écouter tout le monde mérite d’être frappé. Enfin, disons qu’avec lui, ce qu’il avait tendance à infliger aux types avec lesquels il se battait était toujours mérité. Il y’avait toujours de ‘bonnes raisons’ à cela. Fallait peut être que je finisse par m’y faire en fait… Oui, mais non. « A ton tour maintenant. » enchaina-t-il. « Ahem.. Oui donc.. Eh bien, tu vois moi, je.. » je commence, quelque peu hésitante, ne sachant par quel bout prendre la chose, ne pouvant même pas me triturer les mains parce qu’elles me brulaient. « Tu sais que j’aime courir, n’est-ce pas que tu le sais, et j’adore faire ca le matin, oui je trouve ca plus agréable parce que... » je débite tournant inlassablement autour du pot, mes prunelles vagabondes, ne sachant où se poser avant de croiser son regard. « Ok, ok ! Ca va, ca va ! donc je courais et je n’ai pu me contrôler donc j’ai commencé à aller vraiment très vite, trop vite apparement, et j’ai..trébuchésurmonlacet » fis-je en accélérant sur la fin, affichant un sourire idiot avant de rire. « Et là, je suis venue dans le but de plonger mes mains dans l’eau froide du lac ! » je m’exclame en m’exécutant dans la foulée premièrement pour éviter ses railleries, qui en soit seraient totalement justifiées, puis deuxièmement parce que… putain ce que j’ai mal aux mains !

Jaden voyait à quel point Noélie désapprouvait son comportement, mais il ne comptait pas changer pour autant. Elle n'était pas la première à le réprimander sur ce point là, et généralement il ne prêtait pas attention à toutes ces remarques parce que personne n'était en mesure de comprendre ce besoin compulsif de se battre. Il était vrai qu'avec le temps c'était devenu une habitude, mais une habitude qu'il ne pouvait se résoudre à laisser tomber. Taper sur les autres le soulageait beaucoup trop pour songer à arrêter de se battre. « Ils le méritent tous de toute manière . », dit-il avant de tirer sur sa cigarette. Il ne voulait plus en parler avec la jeune femme, l'histoire était close pour lui il n'y avait pas grand chose à dire là dessus. On l'avait provoqué et il avait répliqué par un coup de poing, l'histoire s'arrêtait là et il ne voulait pas revenir là dessus. Il voulait laisser le passé au passé, peu importe ce que la jolie blonde aurait à en dire. Il n'était pas là pour que les autres approuvent son comportement, et cela se voyait quotidiennement. Il écouta Noélie, qui semblait vouloir s'amuser un peu de lui, en traînant pour lui avouer comme ses mains étaient arrivées dans cet état. Finalement elle se décida à lui dire et il ne put s'empêcher de rire après ce qu'il venait d'entendre. « Sérieusement ? C'est un lacet défait qui t'as coûté ça ? », ajouta-t-il en riant. La jeune femme plongea ensuite ses mains dans le lac pour calmer sa douleur, ce qui arrache un nouveau sourire à Jaden. Parce qu'après tout la situation était plutôt cocasse et il ne pouvait rester de marbre face aux paroles que lui avait tenu Noélie. « Je ne suis pas certain que l'eau suffise à te soulager complètement, tu devrais aller faire un tour à l'infirmerie. » Ça pour donner des conseils il était doué, mais quand il s'agissait de se les appliquer c'était une toute autre histoire. S'il souhaitait fortement que son amie aille voir l'infirmière pour que sa blessure n'empire pas, elle aurait toutes les raisons de rire à sa remarque étant donné qu'il n'était allé voir personne pour sa main. Alors il faisait un beau donneur de leçons, lui qui n'était même pas capable de se faire aider pour une main fracturée, mais ses finances et son égo l'empêchaient de faire quoi que ce soit pour arranger la situation.

« Ils le méritent tous de toute manière » dit-il, et honnêtement bien que j’avais encore un paquet de chose à lui dire, mais de toute évidence le sujet était clos. Je soupire une nouvelle fois, puis huasse simplement les épaules. Ce n’était que reculer pour mieux sauter, car je ne compte pas m’arrêter là. Mais soit, ce n’est pas aujourd’hui que je vais le changer ou demain.. Bref. Par ailleurs, je n’ai pas cette prétention là, de le changer du tout au tout.. Loin de là, j’apprécie Jaden justement pour ce qu’il est. Et, si je le réprimande, jusqu’à parfois en être lourde, sur ce point là ce n’est pas pour l’emmerder, seulement parce que.. Je m’inquiètes. Oui, voilà. Je ne voudrais pas qu’on lui fasse du mal, qu‘il soit blessé. C’est compréhensible pourtant. Alors que l’eau froide a un effet non-négligeable sur mes mains en feu, j’entend le rire du jeune homme s’élever. « Sérieusement ? C'est un lacet défait qui t'as coûté ça ? » J’arque un sourcil. « C’est d’un traitre ces bouts de ficelle tu sais » j’ironise avant de lui tirer la langue, gamine mais néanmoins souriante, et de lui balancer de l’eau en pleine figure. Ça lui fera les pieds tient. Je n’avais plus qu’à espérer qu’il ne veuille pas se venger parce que les forces me manquaient présentement quant à l’impossibilité d’user de mes mains. Cependant, en voyant sa mine déconfite, c’est moi qui me met à rire. Enfin, rire. Dieu, que ca fait du bien. Un rire léger et naturel. Les événements avaient rendu l’ambiance tellement sinistre et lugubre que la plupart des rires qui retentissaient étaient faux et forcés. Là, ca faisait simplement du bien. Puis, je plonge un peu plus profondément mes mains, les bras, dans l’eau froide, lâchant un soupir.
(…) « Je ne suis pas certain que l'eau suffise à te soulager complètement, tu devrais aller faire un tour à l'infirmerie. » J’éclate à nouveau de rire en vrillant mes prunelles vers les siennes. Spontanément. Automatiquement. Il est sérieux là ? « Fais ce que j’dis mais pas ce que je fais, n’est-ce pas » j’articule après avoir retrouvé un peu mon calme. « Seulement si tu m’y accompagnes » j’ajoute en lui lançant un clin d’œil amusé. « Sinon, ca guérira tout seul.. » Ou par l’action du Saint-Esprit. Dieu, Bouddha, Allah, si vous m’entendez, peu importe lequel, je prend sans rechigner, je le jure.

Jaden ne pouvait que rire en imaginant la scène, même si cela ne l'étonnait à vrai dire guère de la jeune femme. Il était tout de même ravi de voir que la conversation avait déviée, et qu'elle ne portait plus sur son comportement, parce qu'il en avait assez de se faire réprimander à longueur de journée. Il savait que tout cela partait d'une bonne intention, mais il était lassé de toujours avoir à se justifier, alors que pour lui il n'y avait aucune explication à donner. Mais le sujet était donc clôt et il n'allait pas épiloguer là-dessus. « Tâche de faire plus attention alors la prochaine fois », lança-t-il un sourire au coin des lèvres. Il savait bien qu'elle n'y était pour rien et qu'elle aurait volontiers éviter de tomber de cette manière, mais c'était simplement un moyen de la taquiner. Alors qu'il tire une nouvelle fois sur sa cigarette, il sent de l'eau arriver sur son visage et se tournant il ne put que constater que c'était l’œuvre de la jeune femme. Jaden émit alors un léger rire, avant de se promettre qu'il comptait bien se venger de la jolie blonde. « Crois-moi tu ne t'en tireras pas comme ça. » Évidemment c'était dit sur un ton léger, ce ne serait qu'une simple plaisanterie qu'il comptait plus tard infliger à Noélie en guise de représailles. Il prit alors une bouffée de sa cigarette, profitant du silence qui s'était installé durant quelques secondes, parce qu'il avait toujours adoré le calme et le silence. « Pas de problèmes je t'y accompagnerai. » Il pouvait bien lui promettre d'y aller avec elle, cela ne signifiait pas pour autant qu'il irait voir l'infirmière pour qu'elle essaie de le soigner, parce qu'il s'y refusait fermement. Sa main guérirait toute seule même s'il devait souffrir le martyr, il n'aurait eu d'aide de personne d'autre et c'était bien mieux comme ça selon lui. Ce serait le toucher dans sa fierté que d'admettre qu'il avait besoin d'une quelconque aide. Toutefois il voulait que son amie se fasse soigner, et même s'il savait que les propos de la jeune femme impliquait que lui aussi soit soigné, il faudrait vraiment être persuasif pour le convaincre de faire examiner sa main. Et à ses yeux il n'y avait pour le moment rien qui puisse le convaincre.

Le jeune homme lui conseilla de faire plus attention. Et, elle éclata de rire. « La maladresse ne prévient pas, malheureusement » fit-elle désespérée en haussant les épaules une nouvelle fois, genre au pire c’est pas grave. La blonde conservait ses mains bien dans l’eau, quitte à les plonger encore plus jusqu’au coude, sentant les bienfaits du froid sur ses mains brulantes. Jaden la menaça qu’il se vengerait et elle rit. « J’ai hâte de voir ce que tu me réserves tiens » rigola-t-elle à nouveau. Non qu’elle sous-estimait le jeune homme, et, à vrai dire, elle ne préférait même pas qu’il y pense. Mais soit, elle était curieuse de voir quelle genre de vengeance pourrait-il mettre en place qui n’utilise pas ses poings.
(…)
« Pas de problèmes je t'y accompagnerai. » annonça-t-il. Et, elle lui sourit. Dans ses paroles, elle comprit facilement qu’il ne lui avait certainement pas promis de se laisser soigner mais c’était déjà un début. Déjà, l’entendre dire qu’il irait à l’infirmerie était une chose. Puis, Noélie imaginait aisément la scène: Jaden et son bras meurtri puis une infirmière absolument incapable de laisser un étudiant dans cet état. Donc, elle finirait forcément par l’obliger à se laisser faire. Enfin, l’oméga phi espérait grandement. Noélie finit par retirer ses mains de l’eau et retourna près du brun puis déposa ses lèvres sur sa joue. « Merci » dit-elle, le gratifiant d’un sourire. « Alors, c’te rentrée ? » lança-t-elle de manière anodine. Entre « parias » ils se comprenaient plutôt bien. L’un considéré de traitre par ses frères et l’autre d’intrus par ses frères. Soit. La blonde se doutait que la sienne avait du être aussi mouvementée que la sienne. Quelques minutes filèrent où elle attendait la réponse de son ami jusqu’à ce que ses mains lui fassent trop mal pour rester immobile et calme. Ce devait être le mélange: eau + air qui passe moyen. « Infirmerie » annonça-t-elle soudainement, ne lui laissant pas le temps de répondre, en sautant sur ses pieds.